Monday, March 20, 2006

Le Portrait de Sylvianne.

Les cheveux châtains courts, des mèches rousses et blondes qui rappellent ses yeux dorés. Des petites rides au coin des yeux qui se plissent selon que le regard est dur et sérieux ou souriant et franc. Vêtue de jean et blouson marron Sylvianne Perron-Follic est à 41 ans une femme dynamique qui inspire confiance. Elle est une de ces êtres humains qui ont des principes moraux et qui croient en la justice. Enfin qui y croyait. Parce que depuis trois ans, coté justice, elle a donné.

Une histoire banale de licenciement abusif qui tourne à l’injustice. Mais Sylvianne est aussi une femme de caractère qui ne se laisse pas faire. Alors, en même temps que son procès s’éternisait, elle s’est employée à se construire une nouvelle vie. Après quinze ans de travail salarié dans la même entreprise, elle est repartie à 0. Elle qui n’avait pas fait d’études supérieures, elle décide de passer son bac et enchaîne avec deux années de formation à l’université.

La volonté, elle n’en manque pas, le courage non plus. Et il en fallait pour mener de front ses études, son rôle de mère : pour elle l’éducation de ses trois enfants âgés de 4, 7 et 11 ans est une priorité. Sans oublier le choc psychologique lié au bouleversement de la routine quotidienne stable et si rassurante.

Comme elle l’avoue elle-même, derrière tant de détermination se cache aussi une nature anxieuse. Elle échoue au premier examen juste après l’annonce du licenciement, passe quelques nuits blanches les veilles de jugements et s’effondre quand elle apprend un jour avant la date limite que l’entreprise fait appel de la décision de la Cour des Prud’hommes qui lui avait donné raison.

Surtout, elle ressort ‘cassée’ de cette expérience. « Je croyais que c’était enfoui au fond de moi, mais ça fait toujours mal. » Elle avoue avoir perdu beaucoup de confiance en elle. Parfois le doute s’immisce et son regard se terni. A-t-elle bien fait d’intenter un procès pour en arriver là ? Et d’ajouter profondément déçue : « je ne sais même pas si je pourrai refaire confiance à la justice. »

Elle insiste aussi sur le soutien de son mari pendant cette période difficile, mais en tant que femme indépendante elle a dû regagner l’estime de soi et de celle ses proches. Elle a crée et est maintenant présidente d’une association sportive de badminton et ironise sur son titre, pour ses enfants, avoir une maman présidente, ça représente quelque chose ! Le salaire de son mari est suffisant pour faire vivre toute la petite famille, mais Sylvianne travaille dans les cantines scolaires le midi pour ne pas être complètement financièrement dépendante de celui-ci.

Elle est toujours à la recherche d’un emploi mais interprète comme un signe positif le contrat d’une journée d’animation sportive par semaine qu’elle a réussi à obtenir dernièrement. « Ce n’est pas grand-chose mais c’est déjà ça » conclue-t-elle.

En fin de compte, il faudrait faire une croix sur le passé et penser à l’avenir mais elle avoue ne pas vraiment y arriver « je croyais que c’était enfoui au fond de moi, mais ça fait toujours aussi mal. »Le sentiment d’injustice est là, toujours présent et révoltant. Il faudra vivre avec.

- Propos recueillis par Aurélie Placais.